»Un saut vers l’inconnu » pour construire une ville nouvelle du Burkina Faso
CONCOURS. Architecture-Studio associé à quatre autres agences – Arcade, Beckmann N’Thépé Architectes, Coldefy & Associés et Hardel + le Bihan-réaliseront d’ici à quinze ans la ville nouvelle de Yennenga, située à 15 km de Ouagadougou, capitale au Burkina Faso. Découverte de ce projet, qui se distinguera par une longue coulée verte révélant sur 200 hectares la flore et la topographie locale.
La ville nouvelle de Yennenga, nom d’une princesse populaire devrait sortir de terre au Burkina Faso. Toutefois, une question se pose, sera-t-elle la même drôle de ville qui a poussé en Afrique, Nova Cidade de Kilamba (Angola) où aucun appartement ou presque n’est habité dans ce projet porté par un promoteur chinois ? Espérons que non ! La question se porte pourtant pour la création de cette ville nouvelle de Yennenga, située à 15 km de Ouagadougou (Burkina Faso) remportée ces jours-ci par Architecture-Studio à la suite d’un concours lancé en novembre 2016.
Architecture-Studio, « collectif » et « locomotive » du projet
Parmi 14 agences internationales notamment londoniennes et de l’Afrique du Nord sélectionnées en fin de concours, Architecture-Studio, reconnu comme un »collectif » et « locomotive » à l’international a été désigné lauréat en association avec Arcade Architecture, Beckmann N’Thépé Architectes, Coldefy & Associés Architectes Urbanistes et Hardel + le Bihan architectes.
Contrairement en Angola, ici, au Nord-Ouest de Ouagadougou, il n’y aura pas d’immeubles à perte de vue, tous biens alignés et bien rangés des commerces, des écoles, dans des couleurs chatoyantes, à l’image du célèbre jeu vidéo : Sim City.
« Ici, ce grand projet burkinabé porté par un promoteur privé CGE souhaite devenir sur près de 800 hectares le symbole de la ville africaine du futur d’ici à quinze ans, nous explique Aldric Beckmann chez Beckmann N’Thépé. L’aventure a commencé dans ce moment de spontanéité à l’occasion d’une rencontre avec Talents & Co et ensuite des architectes et urbanistes pour participer à cet exercice à l’échelle international. »
« C’est une opportunité sur ce concours international, nous avons pu présenter un patchwork de principes ou un ensemble d’interprétations que l’on peut appliquer dans une ville », nous explique également Widson Monteiro, architecte et urbaniste.
La « colonne vertébrale » du projet sera une longue coulée verte révélant sur 200 hectares la flore et la topographie locale, et une envie de mixité voulue autour des programmes. « Chaque bâtiment doté de matériaux locaux (briques et terre) sera aussi en continuité avec la construction d’un nouveau parc », ajoute Aldric Beckmann.
« La ville s’élèvera alors ingénieusement expliquent les architectes : au Nord, les édifices contrôleront l’arrivée de l’Harmattan, un vent sec chargé de poussière alors qu’au Sud, leur implantation plus parcimonieuse permettra ainsi aux vents doux et humides de la mousson de rafraîchir la ville. » Cette exemplarité passera notamment par une implantation géographique, écologique et culturelle des plus respectueuses et subtiles. D’un point de vue écologique, Yennenga sera conçue comme une ville autonome qui produit son énergie et les matières nécessaires à son fonctionnement.
« La maîtrise des vents, associée à l’exploitation de l’énergie solaire et la récupération d’eau grâce aux pièges à rosée disséminés dans la ville, illustrent ce désir d’autonomie énergétique et sont les marqueurs d’une conception vertueuse », expliquent les lauréats. L’utilisation de matériaux locaux pérennes dans la construction des différents édifices bioclimatiques participe à cette démarche.
Sur le plan culturel, les agences reprennent dans le plan masse du coeur de ville la forme de l’oeil de cette héroïne populaire qui donne son nom à la ville (mère fondatrice d’un des plus grands peuples du Burkina Faso), ajoute Widson Monteiro. Avant de préciser que « le dessin des créations architecturales contemporaines s’inspire des formes traditionnelles. »
La ville nouvelle se verra aussi animée par une effervescence culturelle riche et accueillera un centre des beaux-arts, différents lieux de culte et un centre de conférences ; mais aussi un haras, en hommage à la tradition cavalière du pays et de la princesse Yennenga.
En revanche, des obstacles se dressent reconnaissant les nouveaux lauréats. « Nous avons tout de même des interrogations par rapport aux ressources, aux questions financières, avoue Aldric Beckmann. Il faut reconnaître qu’il s’agit d’un un grand saut vers l’inconnu, nous risquons de naviguer à vue durant quinze ans car la ville africaine reste à inventer ou à s’inventer elle-même. » Et à Widson Monteiro de glisser dans la conversation : « En même temps, naviguer à vue fait partie de la culture africaine. »
Malgré les nombreux préjugés que les professionnels de l’architecture se font de construire en Afrique, des signes s’annoncent positifs pour les cinq agences françaises : « Les routes sont désormais tracées pour relier les infrastructures à la ville et nous les rencontrerons dès mai prochain pour s’occuper des 200 hectares. C’est bon signe ! », conclut Aldric Beckmann.
Recherche Contributrice (eur) indépendante (t) BATIRICI , CLIC ICI
BATIRICI, l’actualité du BTP et de l’immobilier en Côte d’Ivoire